Nous voilà arrivés à San José de las Calderas chez Elvin, notre guide pour le volcan ! On ne le sait pas encore en arrivant, mais nous allons vivre une expérience tellement riche émotionnellement qu’il va nous falloir quelques jours pour s’en remettre…

Tout commence par une prise de contact quelques semaines avant avec Elvin, un guide fortement recommandé sur les groupes facebook de voyageurs pour faire l’ascension de l’Acatenango. Et tout de suite le feeling passe, il nous propose de venir passer quelques jours chez lui avant de faire l’ascension : “mi casa es tu casa”. Nous décidons de faire l’ascension le jeudi afin d’avoir une journée complète pour se poser et s’habituer à l’altitude. Mais finalement, au vu du temps très chargé jeudi matin, Elvin nous proposera de repousser d’un jour de plus, en espérant un temps un peu plus dégagé, ce qui nous permettra également de faire l’ascension avec d’Elvin (plutôt qu’un autre guide de son association), et avec Elisa, une touriste française en voyage express pour une semaine au Guatemala.

En attendant le grand jour, nous partageons de très bons moments au sein de cette belle famille, encore une fois réunie autour de la mama… ici c’est Rosa ! Elle gère beaucoup de choses : repas, courses, vaisselle, travail au champs, elle monte même au volcan de temps en temps en seulement 3h… et en plus elle est très blagueuse ! Il y a aussi Ovidio, le papa, le sage et le visionnaire de la famille. Tout comme sa femme, il a le visage très marqué par l’expérience, la positivité et la joie de vivre. Qu’ils sont beaux tous les deux !

Nous échangeons beaucoup avec Ovidio. Il est très fier de sa famille, de ses enfants et porte un regard à la fois pragmatique et optimiste sur sa vie et les épreuves qu’il a enduré. Partis de rien en se mariant à 15 et 17 ans, ils ont travaillé et économisé sans relâche, et ont maintenant une grande maison, divisible pour chacun de leurs 6 enfants, 4 d’entre eux ont fait des études supérieures, plusieurs champs à cultiver, des animaux, et l’entreprise familiale d’excursion touristique au volcan…

Ils viennent de vendre leurs vaches et de faire un prêt pour acheter un nouveau terrain, et il a tellement d’idées pour le futur : nouvelles plantations, ecolodge pour le tourisme autour du volcan, agrotourisme, plantes médicinales, l’apprentissage de l’espagnol… Comme on l’avait vu à San Pedro, l’esprit communautaire est très fort ici, et quand Ovidio nous parle de ce nouveau terrain, la première chose qu’il évoque c’est la création de nouveaux emplois pour sa communauté. Parmi de nombreux sujets, il nous raconte ses années difficiles d’immigration illégale aux États-Unis, sa chance d’avoir pu rentrer quand il l’a voulut, et l’épisode douloureux de 2007 où 350 migrants guatémaltèques, dont 150 de ce petit village, ont été déportés vers leur pays d’origine, dans des conditions insoutenables et après 6 mois en prison, les laissant sans travail et avec des dettes colossales. C’est un épisode très important de leur vie car c’est aussi l’origine de leur projet. Ils ont créé avec Elvin une association de guides pour faire des excursions touristiques sur le volcan afin de créer des emplois pour ces personnes, qui n’y connaissaient rien mais qui savaient parler anglais. Ils ont donc formé des dizaines de guides pendant des années pour arriver là ou ils en sont aujourd’hui, ou une cinquantaine de personnes vivent directement de ce tourisme (je simplifie et vous passe les nombreuses péripéties, mais une partie de l’histoire est racontée dans cet article si ca vous intéresse).

Il y a ensuite Elder et sa femme Sofia, tous les deux instituteurs, qui ont improvisé une salle de classe dans le salon de la maison, pour les enfants du quartier, car depuis le covid les écoles sont fermées et les cours seulement en ligne (autant vous dire qu’ici,  les ordinateurs et les smartphones avec accès internet illimité, c’est loin d’être la norme…). Elder nous explique aussi qu’ici l’école n’est pas obligatoire, et que de nombreuses familles, en majorité dans les campagnes, préfèrent compter sur leurs enfants pour les aider dans les champs, au tissage ou à la maison, plutôt que de les envoyer à l’école.

Il y a Wesley, le neveu d’Elvin, 11 ans, qui passe plus de temps chez ses grands-parents que chez lui pour le plus grand bonheur des garçons !

Et bien sûr il y a Elvin, le guide, l’entrepreneur, le tchatcheur, qui fait des allers-retours permanents vers Antigua et vers la capitale pour récupérer des clients, et qui développe très bien son activité. C’est une personne avec le cœur sur la main et qui respire la joie de vivre ! Adrien et lui échangerons énormément ensemble.

Bref, on se sent bien ici !

Un matin, on va les aider au champs de maïs pour couper les feuilles basses, afin de nourrir les vaches, et de permettre aux pieds d’haricots de pouvoir s’enrouler autour des pieds de maïs, et de donner un peu d’air aux pêchers qui poussent également dans le champ, voire des courges à certains endroits : la fameuse culture 3-en-1 des maya (appelée “la milpa”). On fait aussi une initiation à la traite des vaches (ils font du fromage frais qu’ils vendent), et c’est clairement Hugo qui s’en sort le mieux !

Nous faisons aussi une virée dans des piscines d’eau thermale avec Elvin et Wesley, assis à l’arrière de son pick-up pour la plus grande joie des garçons. L’occasion pour Adrien de donner un petit cours de natation a Wesley ! 

Petit temps de jeu aussi avec les copains de Wesley : foot, coyote (le “loup” d’ici), et balançoire improvisée dans les champs !

Et Kenzo pourra même profiter, le temps d’une après-midi, de la classe improvisée de Sophia pour les enfants du quartier, et greffera avec moi (traducteur officiel) sur le groupe des petits. Au programme : peinture, marelle et cours sur les voyelles (après lui avoir expliqué pendant 2 mois que pour faire le son [ou] il faut un o et un u, voilà qu’on lui apprend ici que le ‘u’ se prononce [ou]… 😅).

Et nous voici vendredi, c’est le grand jour ! La journée commence sur les chapeaux de roues puisque Kenzo peine à se lever puis vomit 3 fois en 20 minutes… sans compter le temps qui est très couvert ce matin, et quand on arrive au départ de la rando, c’est avec du brouillard, de la pluie, et un Kenzo qui tient à peine debout qu’on démarre la journée 😅 !!

Mais après 3 jours à attendre ce moment, on reste positif, le temps change très vite par ici, et l’expérience est dans la randonnée et dans le partage avec nos compagnons du jour, notre cher Elvin, et Elisa, une française qui vit à New York, et avec qui on accroche directement ! Même Gaïa la chienne d’Elvin nous accompagne pour la joie d’Hugo qui la calinera tout le week-end (au travers de ce voyage, nous découvrons petit à petit sa sensibilité envers les animaux…).

Heureusement que nous avons pris un cheval pour nous accompagner dans cette ascension. À la base, on avait imaginé qu’Hugo et Kenzo allaient se relayer entre marcher et se reposer sur le dos du cheval, mais Kenzo n’est vraiment pas en forme, alors il sera dessus toute la journée et Hugo se fera 3 petites pauses de 5 minutes en le rejoignant.

À un moment, Kenzo commence à s’endormir sur le cheval et risque de tomber. Alors Elvin le prend sur son dos, et on improvise un porte-bébé avec des serviettes… Une petite sieste de 20 minutes, un bon pique-nique pour reprendre des forces, et on repart !

La rando grimpe fort (1500 m de dénivelé sur 8,5 kms de rando), et avec l’altitude (plus de 3000m), Chloé galère à retrouver son souffle. On se cale sur son rythme et on fait des petites pauses assez souvent. On randonne au travers d’une belle forêt humide, la pluie s’est vite arrêtée mais un épais brouillard nous accompagne, donnant un côté mystique à ce volcan.

Lorsqu’on arrive sur le dernier km, le brouillard s’échappe et nous offre une jolie vue en contrebas. Et au détour d’un virage on le voit enfin, avec ses flancs gris, ocre et vert et sa fumée grise au sommet, le Fuego, ce volcan en activité pour lequel on grimpe depuis 4 heures ! Comme pour nous saluer, il nous offre sa première explosion avec un petit nuage de fumée, magique… Juste à côté il y a un autre volcan, majestueux, l’Agua, éteint depuis un moment et tout drapé de végétation épaisse jusqu’à son sommet.

Nous arrivons au campement vers 15h et assistons à plusieurs explosions qui nous envahissent de joie. Que c’est beau, impressionnant et hypnotisant toute cette puissance. Un spectacle à voir et à écouter…

Comme il ne fait vraiment pas chaud ici, Elvin nous prépare un petit chocolat chaud, on se couvre bien et on assiste pendant 1h à ce beau spectacle avec beaucoup d’émotion. Puis de nouveau le brouillard s’invite… Le spectacle ne devient plus que sonore et on se regroupe autour du feu de camp. La luminosité décline petit à petit et on termine la journée sur une bonne plâtrée de spaghettis bolognaise cuits au feu de camp, qui nous réchauffent bien l’estomac. Puis vers 21h on commence à s’installer dans les tentes pour la nuit. La vue est totalement bouché depuis 2h, on est un peu tristes… 😥

Mais 10 minutes après, Elvin nous crie “la familia, es descubierte !” Alors on sort la tête de nos tentes, bien emmitouflés dans nos duvets, aux premières loges pour le spectacle, il n’y a plus qu’à attendre… Et au bout d’une petite demi-heure, la magie opère, l’explosion qui n’était tout à l’heure qu’un épais nuage de fumée se transforme en immenses projections de lave rougeoyante qui illuminent la nuit. Nous voyons des rochers incandescents rouler le long des flancs de Fuego…
Certainement l’un des plus beaux spectacles qu’on a vu de notre vie…

Que d’émotions pour nous 3 (Kenzo s’est hélas profondément endormi, et Chloé n’arrive pas à le réveiller assez rapidement pour voir l’explosion… et puis il a vraiment besoin de récupérer). On a tous les larmes aux yeux, on ne peut pas s’en empêcher. Dans la tente avec Adrien, Hugo, les yeux pleins de larmes lui dit : “c’est le plus beau jour de ma vie, j’ai trop de chance d’être là, c’est trop beau, quand je ferme les yeux je revois encore l’explosion… je m’en souviendrai toute ma vie…”

Dur de décrocher nos yeux du Fuego, on le scrute sous toutes ses coutures en attendant la prochaine explosion. Et comme ce soir c’est la pleine lune, on voit toute la vallée et les montagnes alentours, c’est vraiment beau. On verra encore 2 ou 3 nouvelles explosions avant qu’Hugo ne s’endorme vers 23h, et nous un peu avant minuit… mais à 1h du matin, un énorme boom nous réveille, bien plus fort que tout ce qu’on a entendu jusqu’à maintenant… Adrien cri “explosion !!” et on ouvre tous notre tente à la hâte pour voir le spectacle ! Hugo se rendort très vite, mais nous on repasse 1h à contempler le Fuego qui nous offre encore 2 belles explosions et on finit par se résigner à aller grappiller 1h de sommeil vers 2h30…

Réveil à 3h30 pour Adrien, qui est censé finir l’ascension de l’Acatenango avec Hugo, Elisa et Elvin pour aller voir le lever du soleil au sommet. Mais de nouveau la vue est complètement bouchée, on ne voit pas à 10 mètres. On ne monte pas et on refait le point au lever du jour. À 5h30, on passe une tête pour voir le lever du jour, mais le temps n’a pas évolué. C’est toujours la purée de pois dehors et il est impossible de distinguer la silhouette du Fuego, à tout juste 2 km devant nous.

Un peu déçus, on sort de la tente à 7h30 pour le petit déjeuner. Kenzo est bien dégoûté d’avoir raté les explosions rouges, mais il a dormi tellement profondément… Son corps avait besoin de récupérer.

Vers 8h30, on rechausse nos sacs et on se met en route pour la descente. C’est très difficile de partir d’ici, on hésite même à rester 1 jour et une nuit de plus…

En débutant la descente, on se surprend à pleurer tous les deux, submergés d’émotions, à la fois parce-qu’on ne veut pas partir et parce-que c’était un spectacle unique, si merveilleux, que peut-être nous ne vivrons qu’une fois dans notre vie…

Mais très vite le paysage se découvre petit à petit… Et vers 9h, au dernier virage avant de quitter le Fuego, son sommet se dégage entièrement comme pour nous dire au revoir !

Voyant la vue se dégager, Adrien fonce voir Elvin, et celui-ci est OK pour faire marche arrière et partir à l’attaque du sommet tous les trois avec Elisa en mode rapido (Elisa a un transport à prendre en début d’après-midi), pendant que Chloé et les enfants descendent à leur rythme avec le cheval !

Pour eux, la descente sera tranquille et très agréable, avec des points de vue magnifiques sur la vallée et des p’tits gars surmotivés et plein de bonne humeur. Ils alternent sur le cheval, Kenzo a retrouvé toutes ses forces, et ils se font régulièrement des petites parties de descente en courant !

Du côté du trio de tête, la montée est rude ! Une bonne heure de marche bien raide pour arriver à bout des 400m de dénivelés manquants. C’est dur et l’altitude n’aide pas, mais quel spectacle tout le long de l’ascension !

On arrive au sommet séchés, mais la vue est complètement dégagée et le moment est magique… Et avec l’effort, la fatigue et les émotions, difficile de retenir les larmes… Mais pas le temps de se poser trop de questions, j’aperçois au loin une nouvelle explosion du Fuego ! Je cours jusqu’à l’autre bout du cratère pour l’admirer ! On restera 20 minutes à admirer le panorama, les montagnes, les vallées, le cratère lunaire de l’Acatenango, les explosions du Fuego, et le halo arc-en-ciel inattendu du soleil…
Un moment hors du temps.

Mais il faut une fin à tout et il est grand temps d’amorcer notre descente, avec une première partie en glissant dans le sable volcanique comme en ski ! Elvin nous arrête ensuite quelques minutes sur un ancien cratère pour nous montrer un petit refuge naturel dans la paroi, et puis c’est reparti à fond la caisse ! On fera quasiment toute la descente en courant, avec quelques petites pauses pour laisser refroidir les genoux. 2 heures de descente à peine ! 😅

De retour chez Elvin, l’heure est venue de refaire nos sacs pour la prochaine étape de notre voyage : Antigua. On salue chaleureusement Elisa, notre compagne New Yorkaise française avec qui on a passé ces 2 derniers jours, et avec qui on a vraiment bien accroché, qui part pour la suite de sa semaine de vacances express. Un dernier repas, que nous a préparé Rosa pour pas qu’on parte le ventre vide, et c’est l’heure douloureuse des au revoirs… C’est encore difficile de faire ses adieux à cette famille si attachante qui nous a tant donné sans rien attendre en retour (on a juste payé l’excursion au volcan, tout le reste est au nom de ‘mi casa es su casa’ !), mais aussi à ce volcan, si majestueux et hypnotique et a cette expérience folle qu’on a vécu.

C’est dur, mais on sait au fond de nous que ça ne peut être que des aurevoirs et non des adieux. C’est impossible, on reviendra un jour, pour les revoir, pour voir ce qu’est devenu ce terrain, cette communauté, et pour revivre cette expérience qu’on n’oubliera jamais…

Nos conseils si vous allez dans ce coin :

  • Elvin Soy et son agence V-Hiking tours pour l’ascension de l’Acatenango (mais aussi pour celle du Pacaya, voir notre article suivant). Un guide vraiment au top, qui monte au volcan depuis qu’il a 5 ans, qui a le coeur sur la main et qui est devenu un ami. Contactez-le de notre part et surtout envoyez-nous une photo avec lui si vous y allez, ça nous fera plaisir 🙂 => Whatsapp : +50242328870

La publication a un commentaire

  1. Priya Gaikwad

    What an experience!!!!!! So great to see you guys enjoying your journey & exploration 🙂

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