Voilà maintenant 2 mois qu’on est parti de notre petit nid douillet près de Toulouse, pour la grande aventure en famille à l’autre bout du monde.

Et après avoir pris tout doucement le rythme “long voyage” et habitué nos yeux à découvrir tous les jours de nouveaux paysages merveilleux, on commence à rentrer petit à petit dans la culture locale et à partager les différences de la vie d’ici. Nous, en discutant avec les nombreuses personnes que l’on rencontre (les guides, les familles qui nous hébergent, notre maestra d’espagnol, les autres voyageurs, mais aussi les gens qu’on croise dans la rue ou dans les transports). Et Hugo en ouvrant grand ses yeux dans les bus, en écoutant attentivement tout ce qu’on raconte (ou en demandant “qu’est-ce qu’il y a ?” toutes les minutes dès qu’on parle avec quelqu’un dans une autre langue, pour être sûr de ne rien manquer !), réalise petit à petit à quoi ça peut ressembler d’être un enfant à l’autre bout du monde… On sent qu’il s’intéresse à tout et qu’il arrive à prendre un peu de hauteur à sa façon.

Bon, pour Kenzo c’est encore compliqué, ces sujets là sont encore tout en bas de sa liste de priorité, très loin de la bouffe, des jeux, des boutons de moustiques qui grattent, et du confort dans ses chaussures… 😅 et puis il a plus de distance et vit au jour le jour.

Voici donc un petit aperçu de ce qu’on a pu comprendre sur la situation et les coutumes d’ici, un peu au Mexique mais surtout au Guatemala, sur plusieurs sujets de société, qui nous font bien réfléchir :

Autant au Mexique qu’au Guatemala, la corruption est monnaie courante dans tout le circuit public (politique, police, enseignement, municipalités…). Combien d’histoires on a entendu sur des présidents qui ont vendu des biens publics à leur propre bénéfice avant de quitter le pouvoir, ou d’autres qui ont détourné des fortunes en toute impunité… Et ici, pas de scandale médiatique ou d’enquête, les gens sont dégoûtés mais totalement impuissants…

Impossible de passer à côté du sujet de l’immigration clandestine et du rêve américain. Énormément de guatémaltèques partent travailler aux États-Unis, souvent au prix d’un voyage long, coûteux et dangereux, pour gagner plus et pouvoir envoyer de l’argent au reste de la famille. A tel point que c’est devenu la première source de revenu du pays ! Mais la route n’est pas sans encombres, les sacrifices sont multiples (emprunt pour payer le voyage, grosses journées de travail, impossible de rentrer pour voir sa famille…), et les déportations (retour au pays forcé) musclées sont fréquentes.

  • Ici au Guatemala, l’école n’est pas obligatoire. La majorité des enfants y vont dans les villes, mais dans les campagnes, de nombreuses familles préfèrent encore garder leurs enfants à la maison pour les aider aux champs ou dans les tâches quotidiennes.
  • Les cours ont lieu en temps normal de 8h à 12h, 5 jours par semaine jusqu’au collège, et l’après-midi est réservé pour les activités extra-scolaires, mais qui sont généralement privées et donc pas données. Avec le Covid, les classes ont fermé pendant plus de 6 mois (au Mexique, elles n’ont toujours pas rouvertes, alors que les frontières n’ont jamais fermées…), puis les cours ont repris, selon les municipalités, en demi classe ou entièrement à distance. Mais comme beaucoup de familles n’ont ni PC ni internet, c’est compliqué… Mais bien souvent, l’esprit communautaire vient pallier le manque d’aide du gouvernement, et on voit s’organiser des classes de quartier, généralement bénévoles, pour aider les enfants à ne pas décrocher.
  • Il y a comme partout des écoles publiques et des écoles privées, mais à l’inverse de chez nous, les profs sont payés deux fois plus dans le public que dans le privé (ou plutôt sont payés deux fois moins dans le privé que dans le public, vu que le salaire d’un prof dans le public est à peu près l’équivalent du Smic d’ici…). Mais là encore, trouver un poste dans le public sans piston solide peut s’avérer mission impossible, quelque soit l’armée de diplômes qu’on peut avoir en stock… cela ne fonctionne pas au mérite mais aux connaissances et aux dessous de table…
  • La garde des enfants ici est forcément très différente de chez nous. Comme il n’y a pas de périscolaire, même les enfants qui vont à l’école passent la majorité de leur temps à la maison. Les papis et mamies habitent généralement au même endroit et peuvent les garder quand il n’y a pas école. Les nounous sont très rares. Autant vous dire que, pour eux, c’est assez choquant quand on leur dit que nos enfants passent 8 à 10h par jour en collectivité !
  • Mais si les enfants passent beaucoup de temps avec leur famille, ils sont aussi très souvent laissés en autonomie, que ce soit à la maison ou à l’extérieur (marchés, stands sur le bord de la route où travaillent leurs parents…). On voit souvent les plus grands s’occuper des plus petits (même quand les plus grands ont 6 ans…), et on entend très rarement les enfants pleurer (ou alors ça dure 10 secondes, et ils se consolent tous seuls, les parents n’y prêtant généralement pas attention). 
  • On n’a pas trop vu de régulation sur la nourriture (c’est ub peu “open chips” à tout moment de la journée, et ça ne fait réagir personne à la maison qu’un enfant se prépare un méga croissant au sirop d’érable 10 minutes avant que le repas soit servi…), et c’est un peu la même chose sur les écrans (télé allumée non stop à la maison, vidéos ou jeux sur le téléphone dans la rue ou les transports dès 3 ans…). Même si on peut facilement voir ces habitudes en France, ils ne semblent pas avoir de recul ou d’informations sur les dangers des écrans chez les petits…
  • Les accouchements sont pour la plupart réalisés à la maison, avec l’aide d’une “sage-femme” improvisée, mais avec la démocratisation de la médecine, de plus en plus de femmes accouchent à l’hôpital, et de plus en plus de césariennes sont pratiquées, souvent d’office (difficile de savoir pourquoi), ce qui inquiète beaucoup les femmes, notamment parce-que ça réduit fortement le nombre d’enfant qu’elles peuvent avoir (ici les familles sont majoritairement très nombreuses).
  • Pour le portage et l’allaitement, et bien tout le monde fait et personne ne se pose de questions comme en Europe si c’est la bonne heure pour qu’il mange (c’est totalement à la demande et n’importe où, dans la rue, dans un magasin, dans les transports, ou même pendant que la maman vous rend la monnaie sur son stand de fruits et légumes 😅, ici pas d’agression juste parce-qu’une maman allaite dans l’espace public…), ou si bébé est bien installé dans l’écharpe de portage, en position physiologique, etc. (toutes les positions sont bonnes et bébé s’adapte toujours !). Et dans les cas où la mise en place de l’allaitement est difficile (notamment à cause d’une césarienne), c’est souvent une autre femme de la famille qui allaite l’enfant, en partie ou en totalité.
  • Sur la partie début de vie, le congé maternité n’existe pas ici, on tolère juste que la femme s’arrête de travailler quand elle ne le peut plus et sur les premiers mois de l’enfant, mais sans aucune compensation financière. Voire il n’est pas toujours certain qu’elle puisse retrouver son poste à son retour…

Bon sur ce thème-là, j’avoue qu’on s’imagine un peu en France il y a 50 ans…
L’image de l’homme qui travaille et de la femme qui s’occupe de la maison et des enfants est très très ancrée dans la société guatémaltèque et, même s’il y a une prise de conscience de la nouvelle génération et qu’on sent que les choses sont en train d’évoluer, il y a du pain sur la planche sur ce sujet !

On le constate en observant les gens dans la rue. On n’a par exemple pas vu un seul homme porter un bébé, et on fait aisément la différence entre les métier masculins et féminins (exemple : les vendeurs de street food, tout comme les conducteurs de transports en commun sont tous les hommes, alors que 90% des stands de fruits et légumes sur les marchés sont tenus par des femmes…).

On l’a vu aussi quand on était hébergé dans des familles : l’homme travaille à l’extérieur la journée et quand il rentre il met les pieds sous la table, prend la première assiette servie, et sort de table sans débarrasser. C’est lui qui bricole à la maison, mais jamais il ne fait la cuisine ou ne participe aux tâches ménagères. Alors que la Mama, personnage central de la maison, se lève à 4h du matin, range la maison, prépare le petit déjeuner, va à la prière, finalise le petit déjeuner, fait la vaisselle, prépare le café pour les éventuels visiteurs, fait le déjeuner, range, nettoie, prépare le café pour les éventuels visiteurs, va faire les courses, prépare le repas, etc. jusqu’à tard le soir. Et forcément, ça se ressent aussi dans la façon d’élever les enfants : difficile pour une petite fille de jouer au foot et pour un petit garçon de jouer à faire la cuisine !

Mais Saydy nous a expliqué que pas mal de choses étaient en train de changer sur ce point, et que la nouvelle génération essayait de sortir du schéma classique où les garçons vont à l’école pour apprendre à travailler et les filles restent à la maison pour apprendre à tenir la baraque.

  • C’est pas parce qu’on est à l’autre bout du monde que le covid disparaît, bien entendu. Mais loin de l’aspect sanitaire et des règles intrusives qu’on vit en France, ici l’impact du covid pour la population est avant tout économique. Les commerces ont également fermé pendant 6 à 9 mois, mais aucune indemnité ou aide quelconque n’a été versée, et les gens ont dû se débrouiller pour trouver d’autres façons de gagner un peu d’argent pour survivre à la crise (travail dans les champs, vente ambulante de produits ou services, emplois précaire dans les hôpitaux…). Tous les métiers dépendants du tourisme se sont retrouvés littéralement à poil, et on le sent bien quand on discute avec les gens où qu’on observe les regards bienveillants et pleins d’espoir que portent sur nous les vendeurs ambulants et des magasins de souvenirs…
  • Et la révolte gronde contre le gouvernement, qui n’a apparemment rien fait pour aider la population à surmonter la crise. Des maigres indemnités ont été mises en place au compte goutte pendant quelques mois pour aider les plus pauvres à payer leurs factures d’électricité, mais le prix des factures a mystérieusement doublé au même moment… De nombreuses aides financières sont venues d’autres pays, mais personne n’en a vu la couleur…
  • Les gens sont à bout, et les manifestations et les blocages s’intensifient pour dénoncer les actions (ou l’inaction) du gouvernement et demander une démission du président… Ils se réfèrent beaucoup au nouveau président du Salvador, qui a l’air de représenter une  aire nouvelle dans sa façon de gérer la crise mais aussi le problème des narco-trafiquant et l’ouverture de son pays au reste du monde.
  • Les revenus à la retraite sont très inégaux ici, environ 400Q (44€) pour une femme au foyer, un peu voire beaucoup plus dans le public, rien pour certains…
  • La majorité des grands-parents habitent donc avec leurs enfants, pour des questions de revenus, pour des questions d’entraide, ou simplement parce-qu’il n’y a qu’une maison familiale que les enfants n’ont jamais quittée. Cela permet aussi d’avoir un mode de garde pour les petits-enfants.
  • Les maisons de retraites sont très peu développées et le peu qui existent coûte bien trop cher pour la plupart des gens.

La solidarité entre les gens et l’esprit de communauté au sein d’un village sont vraiment développés ici. C’est clairement quelque-chose qui nous a marqué, et après un mois passé dans ce pays, on se sent tellement égoïstes dans notre vie européenne…

On nous a offert à manger dans le bus (2 fois et sans rien demander) et on nous a accueilli, hébergé et nourri (gratuitement) pendant 3 jours comme si on faisait partie de la famille. On a passé une semaine dans un village où tout le monde se connaît et où chacun prend soin des autres comme si les 3000 personnes du village ne formaient qu’une seule famille. Où les gens dans la rue peuvent compter sur l’aide des autres pour remonter la pente, et où il est possible de collecter une grosse somme d’argent (malgré la pauvreté des gens) pour financer l’opération médicale d’une habitante…

  • Autant au Mexique qu’au Guatemala, la religion (catholique très majoritairement) est très présente dans la vie des habitants. Sur les nombreuses peintures murales, sur des affiches dans la rue, sur le pare-brise des collectivos et des Tuktuk (JesusCristo es mi senor, Dios me ayuda…), mais aussi dans le langage courant (“gracias a Dios”).
  • Beaucoup de mayas ont encore leur culture et leurs traditions, mais pour la plupart ils ont mélangé leurs pratiques religieuses avec le catholicisme.
  • La religion évangéliste est aussi très présente (avec des églises plus modestes mais très festives). Il y a toujours plusieurs églises, même dans les petits villages, et les messes sont très suivies.
  • On a croisé pas mal de français qui se sont installés au Guatemala, et bizarrement quand on leur a demandé ce qu’ils appréciaient le plus dans la vie ici, ils nous répondaient “on se sent plus libre”… 😳 En tant que français, c’est difficile d’entendre ça dans un pays où l’état fait ce qu’il veut, où il y a de la corruption partout et où la liberté d’expression n’est pas forcément au top… Et puis liberté est quand même le premier mot de notre devise nationale…
  • Mais ce qu’ils voulaient dire par là, est très bien illustré dans l’exemple que m’a donné l’un d’eux : “ici si je veux m’acheter une moto, je m’achète une moto. Je la paye, puis je monte dessus, je démarre et c’est tout. Pas besoin de papiers, ni d’assurance, ni de permis, ni de casque ou de protection quelconque. Et c’est comme ça pour tout. C’est ma responsabilité, mes choix.” Ben oui, forcément la vie a l’air plus facile comme ça… Pourvu qu’on soit prêt à vivre avec le revers de la médaille (si tu as un problème, c’est ton problème 😁, aussi bien avec ta moto, qu’avec ton travail, ta santé ou autre).

Il y a quelques hôpitaux publics, mais la population n’a pas confiance en eux, ils parlent de maltraitance, de longues heures / jours d’attente (il y a toujours la queue dans la rue devant un hôpital, quelque-soit l’heure), de travail à la chaîne… Et parfois il faut faire des heures de routes pour y accéder ou aller voir un spécialiste. Il y a aussi des dispensaires, en collaboration avec les églises, et des cliniques privées. Mais l’accès aux soins peut alors devenir très très cher. L’utilisation des plantes médicinales et de l’auto médicamentation est donc assez courante ici.

Il n’y a aucune compensation financière autour du handicap ou d’un accident qui empêcherait de travailler. Il y a de la mendicité dans la rue et la plupart du temps, que ce soit au Mexique ou au Guatemala, les gens donnent de l’argent ou à manger. Comme nous l’a expliqué une guide à Antigua, si le mendiant a un handicap ou est une personne âgée on essaye de l’aider comme on peut (mais si ce n’est pas le cas, personne ne donne car il est en état de travailler).

Cet article a 2 commentaires

  1. Séb M

    J’aime la définition de la liberté, c’est exactement cela que je recherche lorsque je voyage hors de France.

  2. Mané

    Bonjour, j’espère que vous appréciez toujours votre séjour et que vous ne languissez pas la région .
    Coté covid y a t il beaucoup de cas ? Y a t il de grands hôpitaux pour être soignés là bas . Chose étonnante j’ai l’impression que personne ne porte le masque il doit y avoir moins de cas que dans les autres pays ??????
    Bonne continuation quelque mois encore à ne pas vous voir

    Bisous
    Mané

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